Et j'ai vu une grande lumière
- Fanny Melot
- 28 oct.
- 3 min de lecture
Nous voilà à Zante, après nos 48 heures de navigation.
Notre deuxième défi : traverser la mer Ionienne — soit environ 40 heures de navigation.

Je pensais qu’on resterait cinq jours à Zante, mais la météo en a décidé autrement. Deux jours plus tard, on remettait les voiles, direction l’Italie.
Il y a comme une petite odeur de maison qui commence à embaumer nos narines.
Cette navigation a été bien plus facile. Vous savez pourquoi?
On a pu mettre le pilote !!!
Bon, la houle était toujours là — moins épaisse, mais toujours bien présente. Pas question de tenir debout sans se cramponner. Et pour ça, oui… c’était long.
Mais on avance, et la côte italienne se rapproche.

Je dois quand même vous dire que j’ai beaucoup de chance avec Christophe.
Je sais que vous le savez, mais je vous le redis quand même.
Par son métier, il a l’habitude du sommeil fragmenté. Il fait plus de quarts que moi, et quand ça chauffe, il est redoutable dans l’adversité.
Alors, quand la deuxième nuit, il m’appelle à 3 h du matin pour me dire de venir tout de suite sur le pont, je peux vous dire que je ne prends même pas le temps de mettre mon ciré.
Il me dit de prendre la radio portable au passage.
Je l’attrape et je sors.
Et là… je vois un gros spot blanc qui nous éclaire en pleine face, et qui fait des petits effets de « j’allume, j’éteins ».— « Je ne savais pas que t’avais organisé une nuit dancefloor, baby!»
Bon, là je rigole, mais sur le moment, je ne rigolais pas du tout.
C’était quoi, ce truc ? Il faisait nuit noire, on ne voyait pas le bateau qui nous éclairait.
Alors je prends la radio et je me lance :
— « This is Andy calling a small boat. »
(Traduction : « C’est Andy. Je suis petit et joli. Ne me faites pas de mal. »)
Pas de réponse.
Je tente une autre approche :
— « This is Andy. I see a big light. »
— « OK, Andy. This is the Coast Guard. »
Voilà, voilà… c’étaient les gardes-côtes.
Ils me demandent combien de personnes à bord, leur nationalité, le port de départ et le port d’arrivée.
Une fois fait, ils nous souhaitent bon voyage.
Pfiou ! Je peux retourner me coucher.
5 h du matin, c’est mon quart. (Oui, parce qu’il ne faut pas croire, mais j’en fais aussi hein!)
À 5 h 30, un bateau à moteur arrive pleine balle sur nous.
Pas de spot blanc cette fois-ci : c’est la police maritime.
On est des petits veinards : deux contrôles en moins de trois heures.
Même questions.

On apprendra plus tard que notre route est souvent empruntée par les migrants — Syriens, Afghans, Irakiens — venus de Turquie.
D’ailleurs, il y avait un camp de réfugiés à Roccella, notre port d’arrivée.
J’y ai vu un petit mémorial dédié aux migrants morts en mer… avec la représentation d’un enfant, mort sur la plage.
Mais je m’arrête là dans l’horreur.

Quelques jours plus tard, en reprenant la mer, nous avons quand même accueilli, l’espace de trente minutes, une petite clandestine.
On vous embrasse.



Marin, Marinette et Andy 🫡
Quel récit encore… On passe du stress du projecteur en pleine nuit 😳 à la douceur d’une petite Bergeronnette venue se poser sur Andy 🐦 la plus improbable passagère clandestine qu’Andy ait jamais embarquée 😉.
Vous avez l’art de raconter ces moments : juste ce qu’il faut d’humour, sans jamais effacer l’émotion ni la gravité de ce que vous croisez.
Cette lumière dans la nuit, ne pas savoir à qui, à quoi on a à faire, surtout après tant d’heures sans sommeil et en pleine mer. Vous, vous transformez ça en anecdote presque légère.
Je ne connais pas le métier de Christophe, mais j’imagine qu’il est urgentiste… ou peut-être pompier… ou médecin au SAMU ? Ou…